Voulez-vous faire de la France une nation d’investisseurs ?
13 février 2018 - Une nouvelle législation et un combat culturel sont nécessaires pour faire de la France un pays d’investisseurs, à la force de leur épargne.
La suppression de l’ISF a fait couler beaucoup d’encre, accusée de rendre les riches plus riches. La gageure serait d’inciter les contribuables de l’ex-ISF à engager leurs capitaux dans l’économie française : quelques 3,7 milliards d’euros viendraient hypothétiquement répondre aux besoin de financement de nos nombreuses start-ups, de nos petites et moyens entreprises.
Pourtant un autre gisement, bien plus grand, existe : l’épargne des Français ! Elle concerne la quasi totalité des citoyens. Elle représente donc un vivier d’investissements potentiels autrement plus important.
1 600 milliards d’euros sont aujourd’hui placés dans l’assurance-vie et 400 milliards restent non-alloués sur les comptes courants des Français.
L'économie de l'innovation a besoin de fonds propres, il faut mobiliser l'épargne financière vers le développement de l'économie. #E1Macron
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) 10 novembre 2015
Mettre à profit l’épargne des Français
Que peut-on faire de mieux avec l’épargne des Français qui représente 8% des leurs revenus en 2016 ?
Nous pouvons créer de nouvelles sources de revenus pour tous les ménages en leur proposant de prendre un peu plus de risques. Le produit d’épargne préféré des Français, l’assurance-vie, propose une rentabilité très faible et presque égale à l’inflation (moins de 2 %). On peut faire mieux en allouant l’épargne vers l’investissement plutôt que la prévoyance.
En effet, les entreprises françaises - en particulier les entreprises non-cotées en bourse - font face à de nombreux défis pour rester compétitives : digitalisation, R&D, rénovation des outils de production… pour tout cela, elles ont besoin de capitaux !
Tout le problème est là :
- Le financement des PME est absent des principaux produits d’épargne Français. Par exemple, seules deux compagnies d’assurance ont intégré les actifs non-cotés dans leurs portefeuilles d’assurance-vie.
- Du côté des banques, les PME ont un accès satisfaisant au crédit (83 % des demandes obtiennent un avis favorables) mais les besoins en fonds propres sont beaucoup plus difficilement satisfaits.
La croissance d’une PME est une prise de risque qui passe par l’innovation, la croissance externe, la conquête de nouveaux marchés. Or l’investissement nécessaire est encore trop faible en France : pour l’instant, on n’arrive à un bon niveau que grâce aux investissements étrangers (qui couvrent la moitié les besoins d’investissements du pays).
Les Français peuvent relancer eux-même leur économie
Cette situation n’est optimale pour personne… alors que les Français pourraient prendre plus de risque en investissant dans les PME du pays !
Très concrètement : le rendement moyen serait de 8,7 % contre 5,2 % pour l’immobilier et 3% pour le CAC40 (Source : Association Françaises des Investisseurs pour la Croissance).
L’économie sociale et solidaire a déjà défriché le terrain en mettant en place, il y a plusieurs années, le crédit participatif qui, s’il reste une niche, connaît un taux de croissance à 2 chiffres depuis plusieurs années. Ce succès peut s’expliquer par la limite légale des montants prêtables qui permet d'encadrer le risque pris par l’épargnant.
Alors que faire pour faire circuler les fonds de l’épargne des Français vers l’investissement dans les PME ?
Entre loto et casino : inventer la troisième voie
Tout le monde n’est pas appelé à devenir entrepreneur... mais une grande majorité de Français peut - chacun à son niveau - investir de manière raisonnée dans les PME.
Le monde retrouve le goût d'investir en France : Toyota annonce un investissement de plus de 300 millions d’euros pour son usine dans le Nord et la création de 800 emplois.
— En Marche (@enmarchefr) 22 janvier 2018
Et ce n'est que le début ! #ChooseFrance #FranceIsBack https://t.co/iGOBXouG1l
En plus des efforts réalisés pour renforcer et valoriser l’attractivité du pays, simplifier le rapport entre les entreprises et l’administration, le Gouvernement s’emploie à apporter des réponses concrètes au défi de l’investissement.
Par exemple, les Députés de la majorité ont voté une loi de finance qui crée un contexte favorable à la croissance des PME.
1. D’abord, par la simplification de la fiscalité de l’épargne. Les multiples régimes de fiscalité du capital ont été revu par une taxe unique à 30% sur tous les revenus du capital. Désormais, chacun pourra arbitrer ses investissements en fonction du risque et de la rentabilité sans avoir à naviguer dans le maquis de la fiscalité du capital.
2. Ensuite, la transmission des PME a été rendue plus efficace. Il est permis aux entrepreneurs de bénéficier de l’abattement fiscal de 500 000€ sur la plus-value générée une fois quand ils le veulent dans leur vie, et non plus uniquement lorsqu’ils partent à la retraite.
3. Enfin, le Gouvernement ne compte pas s’arrêter en chemin. Les discussions en cours sur le futur projet de loi PACTE visent en bonne partie à aborder la question de la croissance des PME.
Faire de la France une nation d’investisseurs
Tout cela doit aller plus loin : un vrai changement de mentalité doit avoir lieu en profondeur.
Le défi est d’amener chacun, conseiller financier comme épargnant, à se poser la question de son rôle dans l’écosystème économique. On parle du citoyen-consommateur qui peut faire évoluer grande-distribution et industrie agro-alimentaires par ses choix de consommation. Il faut réveiller le citoyen-épargnant qui, par ses choix de placements, va stimuler l'économie locale, créer des emploi, permettre l'innovation.
Pour cela, la mise en place de nouveaux outils ou mécanismes ne suffira pas. Cette prise de conscience collective nécessite de remettre les PME au coeur des représentations et de la vie des Français. L’objectif est de permettre à chacun d’appréhender la réalité économique des territoires dont les PME assurent le maillage et l’attractivité.
Pour impulser ce changement de mentalité, tous les acteurs ont un rôle à jouer.
- L’école, en premier. C’est la porte d’entrée pour que les futurs citoyens comprennent le fonctionnement de notre société. Le rôle des entreprises doit y être abordé pour l’orientation bien sûr, leur responsabilité sociale et environnementale bien entendu… mais aussi pour lutter contre la méconnaissance en économie qui brime l’investissement ! Des chefs d'entreprises pourraient intervenir ponctuellement en classe pour témoigner.
- Les médias, aussi. Ils jouent eux aussi un grand rôle, notamment pour faire découvrir la réalité de la vie d’une PME. Dans l’audiovisuel public, combien d’heures d’antennes sont employées pour parler des entreprises et stimuler l’envie d’investir ?
- Les banques et les assurances, enfin ! Les institutions financières sont comme toujours au coeur du système. A l’heure où se restructurent les réseaux d’agences, celles-ci gardent encore un maillage incroyable avec un gros potentiel pour faire se croiser les épargnants et les entrepreneurs. Pourquoi ne pas créer des produits financiers locaux ? En formant des conseillers pour qu’ils deviennent experts de leurs territoires et de leur portefeuille de PME, les banques renoueraient avec leur rôle de facilitateur de l’économie réelle… au plus proche de nos besoins et du terrain.
Il suffirait de réallouer seulement 0,5% de l’épargne des Français - soit 10 milliards d’euros - pour trouver une solution à tous les besoins de financement des PME… Alors pourquoi ne pas essayer ?
Signataire : Xavier GINOUX, Président-fondateur d’OpenMind KFE