Sommet des réformistes européens - retranscription

24 septembre 2016 - Retranscription du discours d'Emmanuel Macron au Sommet des réformistes européens

Discours d'Emmanuel Macron au Sommet des réformistes européens

24 septembre 2016

Merci beaucoup. Chers amis, je suis très heureux d’être avec vous, aujourd’hui, à Lyon, dans cette belle ville, cher Gérard, ce beau symbole, après avoir traverser le pont nous avons, toutes et tous, rejoint ce musée des confluences. Parce qu’au fond c’est bien de cela dont il s'agit aujourd’hui. De savoir comment, ensemble, quelques soient nos sensibilités politiques, quelques soient nos origines nationales, quelques soient au fond nos provenances et peut être nos destinées aux unes et aux autres, comment converger pour porter un projet commun, pour relever un défi commun. Et dans cette belle ville de Lyon, il y a eu de telles aventures qui ont été relevées. Parce-que c’est une de ces grandes villes européennes, où, dans des moments de troubles, parfois de doute où l’histoire était a réinventer par l’échange par l'ouverture: celle du commerce, de la culture, des arts et de la finance ; et bien l’Europe s’est aussi réinventée. Et le défi qui est le nôtre aujourd'hui, vous l’avez les unes et les autre rappelées dans vos propos, c’est bien celui de la renaissance Européenne et de la réinvention Européenne. Le défi des réformistes Européens c‘est d’être à la hauteur au fond de la situation que nous somme entrain de vivre. Parce que nous avons laissé de trop nombreux défendre une idée fausse de l’Europe, pousser des actions troubles, inscrire en quelques sortes l’Europe dans une destinée qui n’était pas la sienne. La peur, la défiance occupent au fond l’espace que nous leur avons laissé. Et je suis d’accord avec Sylvie GOULARD : c’est de notre responsabilité et il faut bien la mesurer. Nous y avons toutes et tous notre part. Lorsque nous laissons s‘exprimer surtout celles et ceux qui doutent, qui sont pour faire sortir la Grèce un jour, la Grande-Bretagne l’autre, les Pays-Bas ou la France le jour d'après : nous sommes pas à la hauteur de la promesse à un moment tenue. Mais lorsque nous n’avons plus, en quelques sortes, une voix de désir à porter, nous laissons en effet la place aux doutes. Le cynisme, la langueur, l’irresponsabilité et l'efficacité sont nos véritables ennemis aux moment où nous nous parlons. Alors on peut déplorer, Gérard COLLOMB l'évoquait, que d'aucuns préfèrent ne pas en parler, pour des raisons obscures, qui ne sont pas en tout cas à la hauteur des enjeux. Quiconque a à s'exprimer sur ce sujet vital devrait être ici aujourd'hui s’il partage nos valeur, nos défis c'est à dire cette volonté de remettre l'Europe à la hauteur de son histoire. Parler de fond, d’Europe, trouver des solutions concrètes pour que notre projet avance. C’est tout cela aujourd’hui notre responsabilité et en nous ré-appropriant des mots que nous avons laissé aux autres : aux ennemis de l’Europe ; celui de souveraineté, celui d'identité et celui de démocratie. Et c’est bien sur cela que nous pourrons retisser le fil de l'histoire Européenne. Parce-que l’Europe c’est nous, c’est que nous en faisons, c’est ce que nous en décidons, ce que nous décidons de faire ou de ne pas faire, et nos défis sont tous aujourd'hui des défis européens, vous l’avez rappelé les uns les autres dans vos compte rendus.

I. Et au fond, de quoi sommes-nous les héritiers ?

Dans l’histoire des constructions politiques, l’Europe est jeune : elle a 65 ans. Et c’est une construction inédite sur le plan historique et politique. Je rejoins ce que Pascal LAMY disait tout à l’heure : il y a eu en effet un pari au fond, plus encore sans doute pour la zone euro que pour l’Europe qui était que une réalité économique ou monétaire, et bien pourrait sécréter elle-même des conséquences politiques, nous n’avons pas totalement réussi. Mais il y a, au coeur de l’Europe, une triple promesse : une promesse de paix, une promesse de prospérité et promesse de liberté. Et c’est au fond de cette triple promesse dont nous sommes les héritiers. La promesse de paix ; c’est celle qui a permis, dans l’après guerre, de construire cet espace inédit : jamais l’Europe n’a traversé aussi durablement la paix que ce que nous connaissons depuis l'après guerre; nous avons réussi à faire disparaître les conflits intra- européen là où l'Europe n’avait connu durant des millénaires que des conflits entre les États membres. Et nous l’avons fait sous une forme politique totalement inédite, parce que l'histoire de l’Europe à travers les millénaires ca été ce que le droit médiévale appelait les transferts d’Empire : l’empire romain puis cette volonté de faire revivre ces formes impériales, c’est à dire ces formes hégémoniques de quelques uns ou de l’un sur les autres : L’empire Carolingien, l’empire Napoléonien, l’empire Bismarckien, l’empire Nazi. L’Europe a été traversé par des moments d’unité politique mais qui ont toujours été des moments de domination. Cette Union Européenne, notre Europe actuelle c’est une création unique d‘un espace politique de paix d'équilibre sans hégémonie, et cela nous l’avons réussi. La deuxième promesse c’était une promesse de prospérité et la promesse originelle. Hors depuis 1960 la croissance de la richesse par habitant a été en Europe supérieure d’1/3 à celle des Etats-Unis. On le rappelle trop peu souvent. Nous avons réussi, durant toutes les décennies qui ont suivi la guerre, dans une économie de rattrapage, à travers plusieurs grands projets, à construire cet espace de prospérité.

Et puis l’Europe, c’est cette promesse de liberté enfin, d’abord de la liberté de circulation, perçue comme le socle de cette prospérité nouvelle. Schengen, Erasmus, l’euro, la suppression des obstacles, des frais bancaires aux coûts d’itinérance sur nos téléphones, tout ça c’est ce qui incarne cette Europe de la mobilité, de l’ouverture et de la liberté. Donc, pendant des décennies cette Europe a tenue ses promesses, elle a réussi à construire des réalisations inédites et cela nous ne devons pas l’oublier aujourd'hui. Et nous devons constamment le rappeler sinon c‘est trop facile de laisser certaines ou certains qui voudraient installer le doute. Chacun des secteurs qui traverse des crises dans nos économies ont bénéficié de l’Europe pendant toute ces décennies.

Mais pour les Européens, ces trois promesses fondatrices semblent aujourd’hui trahies. Parce que le doute s’est installé, parce que durant au fond ces 15 dernières années : la langueur, une forme d’irresponsabilité collective, s’est installée. Les crises syrienne, libyenne ou ukrainienne, les grandes migrations, inédites depuis 60 ans, les attaques terroristes répétées sur notre sol nous ont ouvert les yeux : et nous ont re-projeté au fond dans une Histoire qui est revenue en Europe avec son lot de drame. Et elle fait douter beaucoup : Est ce que les états ne sont pas finalement pas plus efficaces? Est ce que cette Europe tient encore cette promesse de paix à laquelle nous étions si attaché ? Et dans le même temps l’Europe s’est engluée dans une croissance molle, plus molle que beaucoup d’autres. Parce qu elle n a pas résolu ses propres paradoxes, bien souvent sa propre incomplétude. Parce qu’elle s’est installée dans des équilibres imparfaits, un marché unique certes mais qui n’était pas accompagné de toutes les réformes et parfois de nos propres engagements ; nous avons notre part de responsabilité dans ces dysfonctionnements. Une zone euro, certes avec une monnaie commune, mais des politiques qui restent extraordinairement diverses et une divergence s’est installée en particulier au sein de la zone euro qui a affaibli cette promesse de croissance. Nos économies se sont écartées durant les 15 dernières années. D’abord sous la facilité parce-que nous avions le même taux d'intérêt partout et donc ceux qui étaient peu compétitifs et très endettés ont encore durant les premières année accrus leurs faiblesses. Et puisque parce que nous avons qu’une réponse disciplinaire et non coordonnée dans l'après crise en oubliant que le rôle en particulier au sein de la zone euro était aussi de réduire les écarts. Et on a demandé a beaucoup de pays de faire des efforts budgétaires et des réformes en même temps, très vite, non plus en s’ajustant par la monnaie mais en termes réels sans forcément en même temps avoir la politique d’investissement qui seule aurait pu aider à une relance et donc oui nos économies se sont écartées, notre capacité à croître s’est réduite. Et si nous n’offrons pas d’autres perspectives à la jeunesse européenne alors nous récolterons la colère. Imaginez, depuis presque 10 ans , les jeunes de notre continent ne connaissent que la crise économique. Nous avons plongé nombres de pays dans une situation où la jeunesse connaît un taux de chômage d’environ 50%. Et ils ne voient en effet que sommet après sommet des dirigeants qui leur promettent une crise qui s'achève.

C’est là que nous sommes entrain de nourrir les drames Européens. Pas ceux forcément d'aujourd'hui ou de demain mais ceux d'après à demain à coup sûr. C’est la que nous nourrissons le scepticisme européen. Et le défi économique et politique qui est le nôtre ne doit pas être oublié dans les temps que nous traversons parce que sinon nous générons, nous nourrirons la colère, la frustration qui demain viendra encore davantage désagréger notre projet.

Et puis la liberté de circuler enfin, qui est chaque jour remise en cause pour des raisons de sécurité. Parce que de plus en plus de dirigeants, même certains qu'on aurait pu croire responsables, font croire à leurs opinions publiques que c’est en réduisant les libertés en Europe, parfois dans leur pays, qu'on pourra rassurer les gens et lutter contre les risques auxquels nous sommes aujourd'hui soumis. Et cette tentation du repli, ce rejet au fond de l’ouverture, c’est cela qui vient également menacer cette promesse. Et vous le voyez l’Europe est aujourd’hui en risque extrême, un risque de désagrégation, un risque au fond d'effacement par notre faute, collectivement, et elle ne retrouvera pas spontanément au fond le cours de son histoire. Nous devons aujourd'hui prendre des risques, prendre nos responsabilités en Europe . C’est cela la tâche des réformistes parce que cette Europe est entrain de trahir ses 3 promesses du fait des circonstances, du fait de mauvaises décisions ou du fait de non-décisions parfois, et le Brexit en est une parfaite illustration.

Ce n’est pas un acte égoïste, le Brexit. J’entends parfois des voix qui voudrait comme disait Bertold BRECHT qu’on décide de « dissoudre le peuple », Je ne recommande pas ces pratiques. Elles peuvent paraître commodes mais se retournent toujours contre nous. Mais le Brexit, il dit quoi? Il dit un besoin de protection. Il dit une indignation face à une Europe qui avait perdu son propre cheminement, il traduit l'échec d’une société qui a négligé les inégalités. Il traduit, et c’est un peu d’ailleurs l'ironie de l'histoire , une forme d'échec européen qu’en grande partie la Grande-Bretagne et quelques états membres avaient beaucoup encouragé. Celle d’une Europe où au fond le marché aurait tout réglé.

Nous n’avions plus besoin de normes communes, de sécurité pour les individus. Elle a traduit de la défiance, non pas de la défiance à l’égard d’un étranger lointain mais à l’égard des autres européens, des hongrois, des polonais. Elle a traduit une peur, la peur des perdants. La peur de celles et ceux qui ne réussissent pas dans cette mondialisation et qui ne réussissent pas dans cette Europe. Et oui, si nous ne savons pas reconstruire la renaissance Européenne en considérant, en écoutant, non pas pour être d’accord avec leur colère, mais pour la considérer et proposer des solutions. Si nous n’écoutons pas les perdants, si nous ne leur proposons pas quelque chose, l’Europe, au fond, se repliera et se dissoudra. Et donc ce risque qui nous guette, que nous connaissons chaque jour, c’est celui de la crise européenne. L’épuisement des idées, des méthodes, et sans doute aussi, permettez-moi cette expression, de certaines générations. Je ne l’emploie pas ici sous le simple sens démographique mais en référence à cette belle formule de Shimon PERES qui dit l’année dernière “on est jeune aussi longtemps que la somme des rêves dépasse la somme des réalisations”. Et quand j’entends beaucoup de dirigeants européens dire tout ce qu’ils ont fait durant les sommets précédents mais si peu dire tout ce dont ils rêvent pour notre Europe, je me dis qu’ils sont vieux. Et c’est bien le problème de cette Europe aujourd’hui. C’est un système qui rend l’âme et qui tourne à vide. Cela a été dit, c’est celui des sommets où les uns après les autres, comme à Bratislava la semaine dernière, on s’enferme à huit-clos, on répète des grands principes, et au fond, malheureusement, et c’est notre responsabilité commune, on ne parle plus on ne propose plus de rêves ou de projets, on discute les mots du communiqué. Les mots du communiqué, pour ensuite aller expliquer à chacune et chacun que ça n’était pas tout à fait cela, que nos interprétations sont finalement divergentes, que c’est notre interprétation qui a gagné et pas la leur, et qu'au fond, tout va bien. Mais, partout, malgré tout, où je me déplace, dans le Cantal, la semaine dernière, en Bretagne, un peu plus tôt, auprès de celles et ceux qui ont beaucoup perdu ces derniers mois, qui parfois doutent, je n’entends pas un discours de haine de l’Europe. Ils savent, les uns et les autres, ce qu’ils doivent à cette Europe. J’entends des interrogations, j’entends parfois des indignations, parce-ce qu’on a, au fond, voulu se débarrasser d’une Europe qui protégeait, qui régulait. J’entends de l’inquiétude, parfois de l’indignation contre une Europe trop tatillonne ou trop bureaucratique parce-qu’on l’a laissé faire et s’occuper de choses qui n’étaient pas non plus totalement sa fonction première. Mais, partout, cette lucidité que face à nos défis nous avons besoin de cette Europe, qu’elle fait partie de la réponse. Alors comment au fond recréer ce désir d’Europe, car c’est bien de cela dont il s’agit, c’est bien de cela dont nous avons besoin. Notre réponse à nous réformistes, Pascal LAMY le disait tout à l’heure, ça n’est pas d’aller expliquer aux gens qu’ils n’ont pas bien compris, ce serait trop facile. Mais ça ne marche plus. C’est de savoir comment nous recréons cette Europe chaude, ce désir, cette volonté d’aller de l’avant. Et ma conviction c’est en reprenant le pouvoir sur des mots, des concepts fondamentaux que nous avons laissé aux extrémistes, que nous avons laissé aux anti- européens. Et c’est là qu’en effet, Rico le disait tout à l’heure, nous devons au fond quitter les voies, parfois trop confortables des réformistes ou des gens raisonnables, et aller dans la bataille, sur le terrain. ça passera par la souveraineté et l’efficacité qui l’accompagne. ça passera par la revendication de notre identité européenne et par une vitalité démocratique retrouvée. C’est cela que, finalement, nous devons porter pour combattre le discours de fermeture, pour combattre ces idées trop faciles imposées par certains. La souveraineté d’abord, parce-que c’est à cette condition que nous construirons notre rapport au monde, que nous retrouverons le sel de l’aventure européenne. Nous avons besoin, pour être un espace ouvert au monde, d’avoir des protections. Nous avons confondu des notions pourtant radicalement différentes. Nous avons brouillé, au fond, les messages et ce faisant les actions. Nous avons confondu la protection et le protectionnisme. L’Europe est aujourd’hui un continent ouvert dans le commerce international, ouvert au monde, vivant du monde, construisant sa prospérité par cette ouverture, et la France en premier chef. Nous en avons besoin. Mais, par contre, nous n’avons pas pour autant à être un continent ouvert à tous les vents, sans aucune protection. Et, là-dessus, nous avons parfois accepté, au fond, des facilités. Je l’ai vécu en tant que ministre dans le coeur de la crise sur l’acier. Attaqué depuis 18 mois par les chinois, les indiens, les russes qui faisaient un véritable et qui continuent à faire un véritable dumping sur l’acier. Nous sommes-nous parfaitement défendus ? Je ne le crois pas. Nous l’avons poussée, la solution est européenne, et donc il ne s’agit pas de dire c’est l’Europe notre propre problème, l’Europe ce sont celles et ceux qui nous attaquent indûment ; mais l’Europe ne réagit pas assez vite, elle prend deux à trois de temps que les américains à imposer les tarifs, et elle impose des tarifs 5 à 10 fois supérieurs aux américains. Nous viendrait-il à l’esprit de dire que les Etats-Unis sont un continent protectionniste ? Non. Simplement, si nous ne sommes pas en capacité d’expliquer à nos travailleurs, et la Grande-Bretagne a eu à vivre ça à Portabloc il y a quelques mois en plein Brexit, à leur expliquer qu’au fond nous avons eu des surcapacités en Europe, nous les avons réglées à travers des plans successifs douloureux pour certaines régions. Nous avons eu des défis de compétitivité, nous les avons réglés, en innovant, en investissant, en demandant des efforts à nos travailleurs. Mais, qu’en même temps, lorsque nous sommes attaqués indûment, nous savons nous défendre, pour protéger nos industries et nos travailleurs, parce-que la liberté a des règles, et parce-que ces règles doivent être respectées et parce-que le bonne espace pour les faire respecter c’est l’Europe. C’est cela la souveraineté. De la même façon, nous sommes entrain de vivre aujourd’hui, un défi migratoire, nous sommes entrain de confondre, là-aussi, souverainisme et nationalisme. Et c’est cette deuxième confusion qui est entrain de nous faire perdre la bataille. Ces deux notions n’ont rien à voir, où sont les vrais souverainistes aujourd’hui ? Où sont celles et ceux qui veulent construire la protection des individus, légitime, la cohérence d’un espace politique commun face à des risques, des défis nouveaux, le défi migratoire en particulier ? Ils sont européens, les souverainistes. Parce-que la bonne capacité à répondre à ces défis, elle est européenne, notre réponse est européenne, en protégeant justement, en construisant une vraie politique de développement, de traitement humain des réfugiés sur les lieux d’origine ou en des pays tiers, ce que nous n’avons pas su faire collectivement.

Au Liban, en Turquie, en Jordanie, en ayant une vraie politique de souveraineté commune, lorsqu’il s’agit de protéger nos espaces et en particulier avoir une vraie politique de garde- côte, de garde-frontières qui permettent justement de protéger nos accès communs et pas simplement par subsidiarité de certains états membres de manière, au fond, trop pusillanime. Avoir une vraie politique de coopération en matière de gestion des identités et de renseignement, la réponse est là, elle n’est pas dans le rétrécissement sur les frontières nationales, qui en aucun cas ne permettent de régler les défis migratoires qui sont aujourd’hui les nôtres. Nous pouvons être aujourd’hui souverains et humains dans cette Europe. Parce-qu’en même temps que l’Europe est le seul espace qui protège, chaque état membre a à prendre dans ce défi sa part de responsabilité, et la France aussi. Nous ne parlons pas là de migrants économiques. Nous parlons là de réfugiés, de femmes et d’hommes qui ont pris leur risque, ça n’a rien à voir. Qui sont arrivés chez nous, et j’entends certains, pas très loin d’ici, qui osent dire qu’on protège notre pays en trahissant ses valeurs ? Qui osent dire qu’on va protéger la France en fermant ses frontières nationales et en ne remplissant pas, au fond, ce qui est le coeur de notre devoir moral ? C’est cela le visage qu’on veut donner à la France ? C’est cela la réponse objective, efficace que l’on veut donner à ces défis ? C’est non seulement irresponsable, mais c’est une trahison, profonde. Être souverain, c’est agir efficacement dans cet espace commun, c’est à dire, ensemble, construire les réponses à ces défis qui en effet se jouent à l’échelle européenne. Comment relever le défi de la transition énergétique si ce n’est en ayant un vrai marché du CO2 européen ? Comment répondre au défi du numérique, c’était évoqué tout à l’heure, si ce n’est en ayant une vraie régulation européenne, qui seule est crédible face au acteurs américains ou chinois. Et donc, oui, la souveraineté est européenne. Si on veut s’en donner les moyens, responsables. Si on veut avoir une véritable politique et une véritable ambition. Parce-qu’elle est la clé d’une véritable puissance européenne et en même temps d’une capacité à protéger les citoyens européens.

L’Europe est le niveau pertinent sur ces grands défis. La souveraineté c’est aussi la monnaie, et, cela a été évoqué tout à l’heure pour le Brexit, c’est la raison pour laquelle la zone euro doit être sans faiblesse et sans naïveté dans la négociation du Brexit. Les chambres de compensation ne pourront pas continuer à agir comme avant, depuis Londres. Le passeport financier n’est envisageable que si l’ensemble des règles du marché unique, dont la libre circulation, sont scrupuleusement respectées. Elle traduit les faiblesses d’une classe politique qui a trouvé son bouc émissaire : l’Europe - avant d’expliquer (allez comprendre) que la quitter serait un désastre. D’un débat public qui a combiné dans un même naufrage l’arrogance des experts et le mensonge des démagogues.

La crise migratoire, la crise du lait. L’Europe n’est pas le problème : c’est notre meilleur moyen de nous en sortir.

Le Brexit n’est pas une crise britannique. C’est une crise européenne. C’est un signal d’alarme adressé à tous les Etats membres, à toutes celles et ceux qui refusent de voir les effets négatifs de la mondialisation.

Nos sociétés sont toutes divisées en deux parts presque égales, entre partisans de l’ouverture et tenants de la fermeture. Les élections régionales allemandes, les élections locales italiennes, l’élection présidentielle autrichienne, les dérives polonaises ou hongroises et, bien sûr, ici en France, la montée du Front National : tous les scrutins traduisent cette fracture. C’est à un système épuisé, dans cette Europe fatiguée, que nous avons affaire aujourd’hui. Epuisement des idées, des méthodes et - pardonnez-moi - de génération. Je dis « génération », mais ce n’est pas tant une question d’âge que de jeunesse d’esprit. Comme me l’a dit très justement Shimon PERES, on reste jeune tant que la somme de ses rêves est supérieure à la somme de ses réalisations.

C’est un système qui rend l’âme et tourne à vide. Le sommet de Bratislava, réuni la semaine dernière, en est la caricature. On se retrouve à huis clos, on répète des grands principes, on change un mot dans une déclaration pour ne pas reprendre celle du sommet précédent.

On donne prise à toutes les démagogies, en amplifiant la coupure entre un microcosme aux pratiques ésotériques et des peuples en souffrance qui observent ce ballet désincarné. Ces sommets de la dernière chance qui renvoient au sommet suivant. Que m’ont dit les paysans du Cantal, les agriculteurs de Bretagne que j’ai rencontrés ces derniers jours ? Ils ne m’ont pas dit qu’ils étaient contre l’Europe. Mais ils m’ont expliqué qu’ils étaient contre la norme à outrance, contre la bureaucratie tatillonne, contre l’interventionnisme hors sol, tant éloigné de leurs besoins réels. Il faut recréer un désir d’Europe. Mais pour cela, il faut que l’Europe fasse un pas vers les Européens, notamment via le principe de subsidiarité, pour intervenir au bon niveau, sur les bons sujets.

II/ Alors, comment recréer ce désir d’Europe ?

Précisément, en ne laissant pas le monopole du peuple et des idées aux extrémistes. En ne faisant pas de l’Europe un syndic de gestion de crise, qui cherche chaque jour à allonger le règlement intérieur parce que les voisins ne se font plus confiance.

Cette réconciliation ne se fera pas en un jour. Elle prendra des années. Il faut retrouver le sens du temps long et tracer une vision. Mais quand les choses demandent du temps, il est plus urgent encore de les entreprendre. Commençons par assumer le diagnostic posé : le clivage se situe aujourd’hui entre partisans de l’ouverture et tenants de la fermeture. Réformistes et progressistes, nous devons assumer la société d’ouverture et le choix de l’Europe.

Non pour rejeter avec condescendance le discours de fermeture qui traduit un besoin légitime de protection. Ce serait la pire des erreurs, souvent commise par les partis traditionnels. Mais parce que c’est sur cette question - le rapport au monde, aux inégalités, aux échanges commerciaux, aux migrations, à la protection du territoire, à la circulation des données numériques... - que doivent s’opérer aujourd’hui nos choix politiques fondamentaux.

Etre progressiste aujourd’hui, c’est dire que notre rapport au monde ne réside pas dans l’isolement. Etre progressiste aujourd’hui, c’est dire que cette ouverture n’est tenable que si elle est accompagnée de protections. Etre progressiste aujourd’hui, c’est faire en sorte que l’ouverture puisse profiter à tous. C’est ne pas se contenter de revendiquer une identité fictive ou sans contenu. Il ne suffit pas de parler d’identité ouverte pour être un territoire ouvert. Chaque jour, l’actualité nous démontre que nous ne parvenons pas à toucher du doigt les valeurs que nous aimerions porter. Chaque jour, des femmes et des hommes arrivent sur nos côtes, viennent se réfugier dans nos pays : et nous ne parvenons pas à les accueillir dans la dignité. Nous ne parvenons pas à être ce continent fort et ouvert que nous rêverions d’être. Faisons-en sorte que nos valeurs deviennent réalité. C’est là-dessus que les progressistes seront jugés.

Nous avons trop souvent confondu les mots, brouillé les idées. Nous avons confondu protectionnisme et protection : échanger avec la Chine ou les Etats-Unis, établir des accords commerciaux est bon pour l’emploi et la croissance ; nous devons l’expliquer. Mais commercer sans règle, ce n’est pas la concurrence, c’est la jungle. C’est pourquoi nous devons assumer que l’Europe soit ouverte aux investissements mais, dans le même temps, agir sans relâche pour qu’elle lutte contre toutes les formes de dumping.

Nous avons confondu souverainisme et nationalisme. Je le dis : les vrais souverainistes sont les pro-européens. Car de quoi parle-t-on ? Là encore, il faut revenir au sens des mots pour clarifier les idées. La souveraineté, c’est le libre exercice par une population de ses choix collectifs, sur son territoire. Etre souverain, c’est agir efficacement. On reproche à juste titre à l’Europe son manque d’action et d’efficacité (même si cette carence vient souvent des gouvernements qui reprochent à Bruxelles de ne rien faire). Mais quelle est la bonne réponse ? D’abandonner l’action commune pour agir au niveau national ? Face aux grands défis du moment, ce serait tout simplement une illusion et une erreur. Face à l’afflux des migrants, face à la menace terroriste internationale, face au changement climatique et à la transition numérique, face à la puissance économique américaine ou chinoise, l’Europe est le seul niveau d’action pertinent.

La souveraineté, c’est aussi la monnaie. C’est la raison pour laquelle la zone euro doit être sans faiblesse et sans naïveté dans la négociation du Brexit : les chambres de compensation ne pourront pas continuer à agir comme avant depuis Londres ; le passeport financier n’est envisageable que si l’ensemble des règles du marché unique, dont la libre circulation, sont scrupuleusement respectées. L’euro, c’est un projet plus vaste, d’union monétaire et économique : il est de bon ton aujourd’hui de dire que l’euro a été une erreur ; c’est l’inachèvement de la zone euro qui a été une faute. Comme je l’ai défendu avec Sigmar Gabriel, il faut un budget commun à la zone euro pour favoriser la croissance, permettre la convergence économique et sociale entre ses États membres et faire face aux crises qui frappent la zone entière ou certaines de ses économies. Une monnaie sans budget est vouée à l’échec. Je regrette que ce sujet soient totalement oubliés dans les réunions et sommets qui ont suivi le Brexit.

Parce que la zone euro doit être relancée par plus de solidarité et plus d’investissement. Les États membres ont une responsabilité, la France au premier chef. Continuer à intensifier les réformes, c’est à ce titre que nous construirons notre propre crédibilité et notre capacité, au fond, à redynamiser le couple franco-allemand. Mais dans le même temps, l’Europe et la zone euro ont une responsabilité en termes de solidarité et d’investissement. Sans cela, nous laisserons périr dans chaque pays les réformateurs qui prendront leurs risques, parce qu’ils prendront des décisions difficiles aujourd’hui dont les effets ne sont perceptibles que demain. Ils en payeront les conséquences politiques immédiates si nous ne savons pas les accompagner, et cela c’est aussi notre responsabilité. Le deuxième mot que nous avons à reconquérir, c’est celui d’identité.

Parce que, oui, et cela a été très bien dit par Pascal LAMY tout à l’heure, sur les beaucoup de sujets, les Européens partagent l’essentiel. Et au fond c’est ça le socle même de notre souveraineté, ce pour quoi nous avons fait cette Europe. C’est que, nous ne sommes pas semblables ; mais nous partageons tellement ; il n’y a pas un espace, politique, économique et culturel, comme l’Europe dans le reste du monde. Il n’y a pas un espace, qui combine la liberté individuelle, la protection collective. On ne le retrouve ni en Amérique, ni en Afrique, ni en Asie. Nous souhaitons des échanges commerciaux régulés, la préservation de sécurités individuelles et transparentes. Il n’y a aucun espace qui porte cette culture commune, celle qui a voyagé entre nos Etats membres, cette Europe des musées, de la culture, de la littérature, de la Mittel Europa qui rayonne, au fond, sur toutes ses périphéries, cette Europe des cafés dont parlait Georges Steiner, qui fait que dans l’intimité même de nos vies, de nos promenades, de nos expériences quotidiennes, nous savons quand nous sommes en Europe et quand nous n’y sommes pas.

Et c’est bien parce qu’il y a tout ça en Europe, parce qu’il y a cette identité, qui n’est pas un rétrécissement, qui est ce bouillonnement unique qui fait que nulle part ailleurs dans le monde, il n’y a autant que cultures, de diversité, dans un espace si réduit, avec cette vocation à l’universel qui nous rassemble tous. C’est ça l’Europe, et c’est parce que nous avons cette identité commune, que nous voulons et que nous pouvons être une puissance vis-à-vis du reste du monde, être un espace avec ces valeurs qui nous rassemblent. Si l’Europe n’avait pas cette identité, elle pourrait se permettre ce que nous sommes en train de faire. Mais c’est quand nous l’oublions, quand, au fond, nous retombons dans le piège historique qui est le nôtre, celui des petites différences entre nous, que nous commettons les pires erreurs. Et, oui, les réformistes européens ont ce mot à reprendre à leur compte. Ils sont les porteurs de l’identité européenne, d’une ambition pour cette identité européenne, c’est-à-dire d’être à la hauteur des grands moments de notre histoire collective, ces moments où à chaque fois, nous avons réinventé ce qui nous tenait ensemble, dans les moments les plus durs, en ne cédant rien à la peur, en ne cédant rien aux antagonismes, parce que ce qui nous rassemble est beaucoup plus large que ce qui nous sépare.

Enfin cette Europe elle ne pourra pleinement renaître et repartir si nous prenons tous et toutes ensemble pleinement le risque démocratique. Et je le dis parce que la tentation parfois des réformistes, des progressistes européens ça a pu être de dire : “ nous savons entre gens intelligents, bien éduqués partageant les mêmes objectifs ce qui est bon pour l'Europe. Ne nous précipitons pas pour demander au peuple ce qu'il en pense, viendra le moment où il suivra”. C'est un peu notre tradition historique. Notre Europe s'est faite comme ça, par cette avant garde éclairée. Ce serait une erreur de continuer avec cette méthode. Ce serait une erreur parce qu'on laisserait la vitalité démocratique aux extrêmes, à ceux qui doutent. Et on l'entend déjà le concert de référendum qui est en train de naître partout en Europe. Marine Le Pen ici, qui propose, grande démocrate, un référendum sur l'Europe. Et beaucoup d'autres lui emboîtent le pas. Nous ne devons pas avoir peur des peuples. Nous devons simplement construire cette nouvelle aventure européenne avec nos peuples. Ce qui est différent. Ce qui n'est pas la démagogie du référendum. Ce qui n'est pas la question posée à tout le monde demain : “êtes-vous content avec l'Europe ?”. La réponse on la connaît, je crois que nous sommes en train de la partager. La question c'est : “quelle Europe voulons nous ensemble reconstruire ? Qu'est ce que l'on va perdre avec l'Europe si on l'abandonne?”.

Est ce que l'on répondra mieux à la crise du lait sans Europe ? Moi j'ai plutôt le sentiment que c'est un affaiblissement de certaines réponses européennes qui nous a conduit la et un défaut d'anticipation de notre part. La clé aujourd'hui de notre réponse elle est au fond ni dans les conclaves diplomatiques qui se succèdent, fatigués, ni dans le référendum défouloir. Elle est dans une exigence démocratique apaisée, éclairée. C'est pourquoi ce que nous proposons, ce à quoi je crois très profondément, c'est d'organiser un vaste débat l'an prochain, à un moment politique clé : celui des élections entre autre en France, en Allemagne et aux Pays Bas. Et de lancer dans toute l'union européenne des conventions démocratiques pendant un allemand dans chaque Etat, selon des modalités ouvertes, laissant la place au choix des gouvernements et des collectivités d'organiser un débat européen sur le contenu de l'action de l'union, sur les politiques qu'elle mène, sur les priorités qu'elle doit avoir en coordonnant ce débat, parce qu'il ne s'agit pas d'avoir vingt sept projets demain mais bien de sortir de cette discussion avec un projet unique, de s'élever au delà des clivages partisans, au delà des clivages nationaux, pour précisément entre nos pays construire une réponse commune.

Il ne s'agit pas ici de croire à une démocratie participative miraculeuse, Je vous rassure je n'ai pas cette naïveté, en considérant qu'au fond elle livrerait toutes les solutions que les responsables politiques n’ont plus le courage ou la lucidité de proposer, mais soumettre à la discussion collective, demander à chacun de réfléchir, de proposer avec ses débats dans les régions, dans les assemblées parlementaires, au Parlement européen, par des consultations en ligne, peut redonner confiance et créer un formidable élan. Je le crois très profondément. C'est cela l’Europe chaude dont nous parlions tout à l'heure. Et nous en avons besoin. Parce que tous ces débats en Europe donneront une vitalité, une réalité à un demos européen qui aujourd'hui n'existe pas, parce que nous avons construit au fond des règles collectives pour le fracturer ici en vingt huit débats. Se nourrissant de ces débats les gouvernements européens élaboreraient une feuille de route, un projet pour l’Europe. Traçant les priorités d’action de l’Union et leur calendrier de mise en œuvre pour les cinq à dix ans à venir. Parce qu'à chaque fois que l'Europe a avancée elle a avancée grâce à une feuille de route de dix ou quinze ans, par des projets refondateurs, en prenant des risques. Il ne s'agit pas là de construire un document de deux cents pages qui ne sera lu par personne, qui donnera lieu à des débats abscons, à des déformations et donc au résultat que nous connaissons parfaitement en France. Mais une feuille de route brève avec quelques défis connus, des actions précises :

La consolidation de la zone euro avec la création d’un budget commun. Le renforcement de notre politique commerciale avec une puissante politique antidumping. La création d'un fonds européen de défense pour développer des capacités communes, etc. ..

Et ce projet pour l'Europe, ce projet clair, c'est ensuite lui que nous pourrons soumettre à référendum. Mais avec un principe identifié déjà rappelé par plusieurs : que chacune et chacun qui suivra ce projet puisse avancer à son rythme. Que cette Europe ne soit plus non plus une Europe de l’obstruction ou parce que l'un ou l'autre doute, celles et ceux qui veulent avancer ne peuvent plus progresser. Nous avons besoin pour recréer cette Europe du désir d'avoir une Europe des projets.

L'Europe a avancé quand quelques uns ont pris des risques. Parfois des risques fous. Et que les autres autres à ce moment là se sont mis à les regarder en se disant : “C'est formidable ce qu'ils sont en train d'entreprendre, j'ai envie d'en être.” L'Europe recule depuis qu'elle s'enlise dans des règles, au fond où un seul peut tout bloquer et où le doute de l'un peut contaminer tous les autres. Donc cette vitalité démocratique elle impose aussi une exigence, et oui, elle donnera lieu à coup sûre, à une Europe à plusieurs vitesse. Elle est déjà là. Mais à une Europe plus vivace, à une Europe qui aura été discutée avec nos peuples, voulu, et à une Europe souveraine, protectrice, efficace. Promouvoir notre identité dans le monde, prendre le temps du débat ouvert pour restaurer la confiance. Voter pour l'Europe que l'on souhaite et non contre l’Europe qu’on rejette. Assumer le choix du peuple sans le craindre. Voilà les principes à mes yeux qui peuvent précisément recréer ici et je l'espère partout en Europe du désir d'Europe.

Parce que c'est cela dont nous avons besoin.

Alors je ne sais pas s’il faut être comme le disait tout à l’heure Enrico “des optimistes de long terme” (pardon comme le disait Lionel) je veux que l'on soit en tout cas des déterminés de court terme. Parce que la bataille se mène maintenant. Parce que si nous ne la menons pas avec nos idées mais sur le champ de bataille en prenant tous les risques, collectivement, nous aurons tous et toutes pris une responsabilité historique : celle de ne pas risquer, celle de ne pas choisir, celle de laisser une Europe dont nous avons tout compris mais qui est en train de se désagréger sous nos yeux, qui Europe station en train de douter d'elle même.

On laisse la voie à celles et ceux qui l’insultent. Donc optimiste de long terme OUI, parce que déterminé dès à présent à nous battre sur chacun de ces domaines parce que la bataille européenne est aussi une bataille française.

Merci pour votre attention.

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