Discours du président de la République auprès des forces mobilisées
16 janvier 2018 - La France doit être à la hauteur de son devoir d’asile, en regardant la réalité en face.
Mesdames et Messieurs les élus du département et de la région,
Messieurs les Préfets,
Mesdames et Messieurs,
Si je suis à Calais aujourd'hui, c'est pour tenir un engagement. Un engagement que j’avais pris devant vous, Madame la Maire, lors du dernier congrès des maires de France au mois de novembre, où vous m'avez invité. Je m'étais engagé à venir avant la fin du mois de janvier, je suis là.
Je vous remercie, Madame la Maire, de votre invitation, de votre accueil chaleureux, et à travers vous, je souhaite ici adresser un message de fraternité, de solidarité et de reconnaissance de la Nation à nos concitoyens de cette belle ville de Calais et du Calaisis. Ils le méritent et nous leur devons.
Je pourrais, comme le général de GAULLE en 1959, évoquer l’exemplarité de votre ville, sa contribution décisive à l’intégrité et à l’unité de notre pays et le lourd sacrifice consenti des deux guerres mondiales.
Je pourrais, comme François MITTERRAND en 1983, évoquer le dur labeur des habitants de Calais et leur participation éminente au développement de la France.
Permettez-moi, tout simplement, de rendre hommage également à leur courage et à leur générosité, et de vous assurer que l’Etat sera toujours à leurs côtés, à vos côtés, pour continuer à développer un territoire en pleine transformation et qui a tant donné au pays ; un territoire qui dispose d’indéniables atouts ; un territoire qui doit absolument changer d’image pour voir pleinement restaurée toute son attractivité économique et touristique.
C’est notre responsabilité collective, et je sais Monsieur le Président du conseil régional, Cher Xavier BERTRAND, que la région est très impliquée avec l’Etat, les élus locaux et le monde économique, dans cette transformation. Je sais combien vous y êtes impliqué et combien vous attendez de nous dans un contexte ouvert par le Brexit et décisif pour la région. Nous serons là, pas simplement à l’écoute de la région, mais en soutien de celle-ci, de son attractivité et de son action économique.
C’est un territoire où le mot cohésion sociale revêt un sens tout particulier, avec des acteurs locaux très impliqués, Monsieur le président du conseil départemental, Cher Jean-Claude LEROY. Et je me trouve ici devant vous deux jours avant le sommet franco-britannique, et il était essentiel d’une part que je vienne au contact des réalités que vous vivez depuis plusieurs mois, plusieurs années, pour pouvoir en tenir justement et en tirer toutes les conséquences et évoquer dans quarante-huit heures, avec Theresa MAY, plusieurs des éléments que nous devons améliorer dans notre gestion commune.
Mieux gérer la question des mineurs isolés, renforcer la coopération policière à Calais et avec les États d’origine et de transit, débloquer des fonds pour soutenir les projets importants pour le développement du Calaisis. Ce seront les trois points que nous porterons dans quarante-huit heures dans le dialogue que nous aurons avec nos amis britanniques.
Je souhaite que ce déplacement soit l'occasion d'évoquer les enjeux et les défis que nous devons relever ici dans un contexte qui certes a profondément changé et j’y reviendrai, mais qui depuis des années est celui d’une pression migratoire forte. Et je suis venu ici pour tenir un langage de vérité.
La longue histoire de Calais et du Calaisis est toute entière inscrite dans sa géographie. Calais est un double passage, le passage entre la Manche et la Mer du Nord et le détroit qui sépare de 32 km environ la France et l'Angleterre. D’ici, chacun peut voir à peu de choses près les côtes d’en face.
Les missions pour lesquelles l’Etat œuvre à Calais sont connues : protéger la frontière, garantir les passages légaux des hommes et des marchandises entre la France et la Grande-Bretagne et assurer la sécurité des personnes et des biens.
Parmi ces dernières, un enjeu fondamental est d’assurer la sécurité des deux infrastructures majeures qui relient la France à l'Angleterre, le tunnel sous la Manche et le port de Calais pour le contrôle de la frontière avec la Grande-Bretagne, pour la sécurisation de Calais et pour la protection de ses habitants dans le respect de nos engagements internationaux.
Regardons les chiffres, ils sont là, ils disent tout. En 2017 sont passés par Calais, via les navettes d'Eurotunnel et les ferries, plus de 4 millions de véhicules légers, plus de 3,5 millions de camions et plus de 30 millions de voyageurs. Un quart du commerce britannique passe par Calais et Calais est le premier port de voyageurs d'Europe. C’est aussi cela le visage de cette ville, de cette région.
Je n’oublie pas le port de Boulogne-sur-Mer qui a aussi un rôle stratégique, notamment comme port de pêche d’importance nationale et européenne. Cela montre combien cette région ici est inscrite dans le passage, l’échange et une histoire européenne dans laquelle elle est irrémédiablement ancrée. Et c’est ce positionnement qui a aussi conduit à une pression migratoire toute particulière.
Calais connaît depuis vingt ans des phases de pressions migratoires, de reflux, et à nouveau des arrivées de migrants qui ont crû ou parfois croient encore pouvoir franchir clandestinement la frontière avec nos voisins britanniques. Aujourd’hui, la pression est moindre. Et le nombre de migrants est sans commune mesure par rapport à celui que vous avez connu avant septembre 2016.
Si des dizaines de milliers de migrants sont passés ici au cours des 20 dernières années, c'est d'abord parce que le Royaume-Uni était leur destination finale. Qu'ils soient réfugiés, exilés ou migrants économiques, la même détermination les pousse vers les îles britanniques. Parce qu'ils y ont de la famille, des amis, un réseau communautaire pour les accueillir, ou peut être parfois un projet professionnel ou d'études, dans une large majorité des cas, les migrants présents à Calais ne souhaitent souvent pas rester en France. Pour eux, notre pays n'est qu'un lieu de passage, comme l'ont été tant de pays avant nous.
Mais ce qui ne devait être qu'un passage se transforme en impasse, souvent en profonde détresse. Car la frontière est fermée aux franchissements illégaux. Aussi, je veux revenir ce matin devant vous, d’abord, sur cet ordre public républicain que nous devons pleinement assurer ici, à Calais, pour le présent et le futur. Ensuite, sur l’accueil, que nous avons profondément transformé dans la région pour faire face aussi à nos devoirs. Et je veux dire quelques mots de notre politique d’asile et d’immigration et de l’avenir du Calaisis.
Je l’ai dit, Calais, de par sa géographie, sa place, est cette terre de passage qui est devenue une impasse pour des milliers de femmes et d’hommes qui ont parfois passé des mois, des années à travers cette route, qui les a menés loin de leur pays. Chacun doit le savoir, tout est fait pour que le passage illégal vers le Royaume-Uni ne soit pas possible. Calais n'est pas une porte d'entrée dérobée vers l'Angleterre, et je veux être ici très clair, cela continuera à être le cas.
En aucun cas, nous ne laisserons ici se constituer ou se développer des filières illégales, en aucun cas, nous ne laisserons ici se reconstituer une jungle ou une occupation illégale du territoire. C’est pourquoi je veux m’adresser d’abord aux forces de l’ordre, mais également aux services de l’Etat, et vous dire ce que j’attends dans ce contexte de vous.
Je veux d’abord vous exprimer les remerciements et la reconnaissance de nos concitoyens de Calais et d'ailleurs, pour le travail que vous effectuez jour après jour, nuit après nuit ; travail remarquable mais peu connu, parfois décrié, souvent caricaturé. Les approximations sur votre action à Calais, parfois les mensonges, souvent, les manipulations, ne visent au final qu'un seul but : mettre à mal la politique mise en œuvre par le gouvernement. Il faut donc faire œuvre de pédagogie, décrire méthodiquement, je le ferai, dans le détail, vos missions, et dans quelles conditions vous les effectuez.
Mais je veux le dire ici très clairement, la France est une République, il y a un président de la République, il y a un Premier ministre qui conduit l’action du gouvernement et un ministre en charge de l’Intérieur. Il a auprès de lui des préfets, la politique, elle est une, elle est expliquée, le gouvernement en est responsable devant le Parlement, et il en répond chaque jour où il est interrogé.
Et dans la République, les fonctionnaires appliquent la politique du gouvernement. Et c’est le cas chaque jour. Alors que ceux qui ont quelque chose à reprocher au gouvernement s’attaquent à sa politique, mais qu’ils ne s’attaquent pas à ses fonctionnaires, qu’ils ne disent pas des contre-vérités sur ses fonctionnaires, et je m’étonne que des commentateurs, que des dirigeants d’organisations, diverses et variées, qui, parfois d’ailleurs, ont à s’exprimer sur la Fonction publique ou ont à représenter des fonctionnaires, se permettent d’écrire ce qu’ils ont pu écrire sur le quotidien de notre Fonction publique.
Dans la République française, les fonctionnaires, quels qu’ils soient, ne se comportent pas tel qu’ils le disent. Je veux remercier ici l’ensemble des forces de sécurité qui interviennent dans des conditions difficiles pour assurer la sécurité de nos concitoyens et les transports de marchandises. Je veux également remercier les agents de la direction interrégionale des routes, la DIR-Nord, qui interviennent en urgence en pleine nuit pour rendre les axes routiers à nouveau praticables et sans danger.
En tentant de pénétrer tous les jours de l'année dans les sites protégés d'Eurotunnel ou du port de Calais, afin de monter dans les camions qui partent de l'autre côté de la Manche, les migrants risquent leur vie et celle des autres. En 2017, vous avez déjoué 115.000 tentatives d'intrusion sur ces sites et dans les zones d'activité de Calais et de sa périphérie, comme la zone d’activité des Dunes, Marcel-Doret, ou du Virval, des noms bien connus pour les forces de sécurité et l’ensemble des acteurs ici présents.
115.000 tentatives en un an, soit une moyenne de 315 par jour ! 24.000 étrangers en situation irrégulière, contre 55.000 en 2016, ont été interpellés à la frontière alors qu'ils étaient cachés dans des camions, le plus souvent à l'insu des chauffeurs, parfois après avoir payé quelques centaines et jusqu'à plusieurs milliers d'euros.
Une économie souterraine du passage clandestin vers la Grande-Bretagne s’est développée, organisée par des filières de passeurs structurées, souvent violentes et qui n'hésitent pas à exploiter les migrants, en en faisant des marchandises. En 2017, la police aux frontières a démantelé 24 de ces filières dans le Calaisis. Je veux ici aussi saluer son action. Les forces de l’ordre sont mobilisées, comme je le disais, et le jour et la nuit, y compris dans les zones les plus obscures où il faut intervenir entre 03h et 04h du matin, où des opérations de maintien de l’ordre sont assurées par les CRS, les escadrons de gendarmerie ou les effectifs de police du commissariat de Calais.
On compte, durant ces opérations, plusieurs blessés dans vos rangs. 24 parmi les CRS et deux parmi les policiers de Calais, le plus souvent par jets de projectiles lors de ces contrôles.
Les forces de l’ordre doivent également faire face à des modes opératoires que l'on ne rencontre nulle part ailleurs en France. Je pense notamment aux barrages érigés la nuit, afin de ralentir les camions et monter dans les remorques. Le nombre de barrages sur les routes qui mènent au port de Calais a très nettement baissé depuis le démantèlement du camp l'année dernière. En 2017, 41 barrages ont été installés contre un barrage quasi quotidien en 2016.
Mais, vous constatez là aussi sur le terrain un durcissement des modes opératoires, l’utilisation de plots en béton, de poteaux, de troncs d'arbre, de barres de fer, ce qui augmente à chaque fois le risque d’un accident grave.
Je veux ici rappeler notamment le décès de ce chauffeur de nationalité polonaise au mois de juin dernier, après que sa camionnette se soit embrasée lors d'un accident sur un barrage.
Cette action ne s’est pas faîte aux dépens de la sécurité publique. En 2017, grâce à votre engagement quotidien, la délinquance générale a reculé à Calais de manière significative, une baisse de plus de 10 % en zone police, de près de 2 % en zone gendarmerie. Les vols avec violences sans arme à feu ont baissé de plus de 48 %, les vols au préjudice de particuliers ont diminué de 16 %, et les cambriolages de 10 %.
Je veux ici vous remercier toutes et tous, remercier aussi la police municipale de Calais pour sa contribution à cette mission partagée qu'est la sécurité. La coopération entre la police nationale et la police municipale est une garantie de succès en matière de tranquillité publique.
Votre mission est donc ici hors norme sur ce territoire, parce que la situation est hors norme. Pour y faire face, l’Etat maintient à Calais d’importants moyens complémentaires de police à travers 450 policiers et gendarmes, sous forme de moyens mobiles, en appui aux forces locales. Au total, 1.130 policiers et gendarmes sont présents dans le Calaisis.
En complément de ces moyens civils, une section Sentinelle de 30 hommes est détachée dans le Calaisis pour assurer la sécurité des sites sensibles. Chaque jour, vous effectuez des patrouilles aléatoires sur le site d’Eurotunnel, le port de Calais, la gare TGV de Frethun, le centre-ville et la zone commerciale Europe de Calais.
Je veux aussi rendre hommage, Monsieur le Ministre, à l’action efficace des douaniers. Collaborant pleinement à l’action de toutes les forces de sécurité que je viens de rappeler.
L'ensemble de vos missions sont remplies avec engagement, dans le respect des principes républicains et je vous exprime ici toute la reconnaissance de la Nation.
Les missions liées à la régulation des flux migratoires sont des missions républicaines. Elles sont au cœur du contrat démocratique. Et je le dis ici aussi qui bien souvent, à ceux qui ont parfois commenté ce quotidien, c’est parce qu’il y a des femmes et des hommes qui font votre travail que d’autres peuvent vivre en tranquillité et prétendre à être heureux.
Je ne laisserai personne caricaturer ce travail et que vous soyez forces de l’ordre affectées dans les services des étrangers des préfectures et sous-préfectures, à l’OFII, à la police aux frontières ou dans les services de police et de gendarmerie.
Ce travail que vous faites au quotidien, pour qui le faites-vous ? Pour les Françaises et les Français et qui protégeons-nous ; nos concitoyens, évidemment au premier chef ceux du Calaisis, mais nos concitoyens les plus populaires, ceux qui vivent les conséquences les plus directes, de l’inaction lorsqu’elle a pu parfois s’installer. Ceux qui veulent et qui peuvent prétendre à une vie normale et qui s’attendent simplement à ce que l’ordre républicain soit maintenu. Qui peut penser une seule seconde qu’une femme ou qu’un homme quitte son pays en prenant tous les risques et va parfois passer des mois à traverser un continent, une mer pour arriver jusqu’ici ? Personne. Je les ai vu ce matin, plusieurs élus étaient avec moi à Croisilles, personne ne peut penser que c’est un geste innocent, que les femmes et les hommes qui sont ici dans le Calaisis à chercher un avenir, sont des gens heureux, ce sont des êtres humains à qui nous avons ce devoir d’humanité à reconnaitre.
Mais qui peut penser une seule seconde qu’un gendarme, un policier, un fonctionnaire de préfecture s’est engagé pour accomplir ces missions délicates qui sont faites au quotidien pour faire ce que vous faites chaque jour ? Pour faire ce que parfois certains décrivent sans venir le vérifier eux-mêmes, qui peut le penser ? La situation est ce qu’elle est, par la brutalité du monde qu’est le notre. Il nous faut tout à la fois, avoir cette humanité parce que ce sont des femmes et des hommes à qui nous la devons et nous devons la reconnaitre, qui sont face à nous, mais parce que ce sont des femmes et des hommes ; fonctionnaires de notre République, qui sont là, qui se sont engagés au quotidien et qui ont droit au respect eux aussi, parce que c’est leur souci de chaque jour qui rend notre tranquillité possible, parce que c’est leur engagement de chaque jour qui rend l’ordre de la République possible.
« Nous devons avoir ce devoir d'humanité envers ces femmes et ces hommes qui quittent leur pays en prenant tous les risques.
— En Marche (@enmarchefr) 16 janvier 2018
Et nous devons aussi manifester notre respect à ces fonctionnaires, engagés au quotidien pour maintenir l’ordre de la République. » #Calais pic.twitter.com/mUyMvRqhAY
Pour cela vous devez être exemplaires. J’exige que chacun dans la République reconnaisse votre dignité, je viens de le dire, mais nous devons et la République se doit de reconnaitre la dignité de chacun.
L’exemplarité se traduit dans le respect absolu de la déontologie policière, dans le respect absolu des droits. Je sais que le respect de ces règles est au cœur de vos missions. Je ne peux pas laisser accréditer l’idée que les forces de l’ordre exercent des violences physiques, confisquent des effets personnels, réveillent les personnes en pleine nuit, utilisent du gaz lacrymogène sur des points d’eau ou au moment de la distribution des repas. Si cela est fait, c’est contraire à toute déontologie. Si cela est fait et prouvé, cela sera sanctionné.
« Je ne peux pas laisser accréditer l'idée que les forces de l’ordre exercent des violences physiques contre les réfugiés.
— En Marche (@enmarchefr) 16 janvier 2018
Si cela est fait, c’est contraire à toute déontologie.
Si cela est fait et prouvé, cela sera sanctionné. » #Calais pic.twitter.com/IcyZ6XD0Lg
Pour autant, nous ne laisserons pas installer de nouvelles occupations illicites, mais à chaque fois que les occupations sont défaites conformément à la loi, les effets doivent être récupérés par les intéressés et le seront. Depuis le mois d’août dernier, un système a été mis en place qui, dès l’arrivée de nouvelles forces, conduit à ce que celles-ci soient dûment réunies en sous-préfecture, puissent rencontrer les associations et que toutes ces règles déontologiques soient précisément rappelées.
Treize réunions de ce type ont été tenues. Aucun manquement à la doctrine, à vos règles d’emplois qui sont formalisées, et à la déontologie qui organise votre action ne sera toléré. Et si manquement il y a, des sanctions seront prises. La réaction des autorités, ma réaction, sera proportionnelle à la confiance sans faille que nous plaçons en vous. Et c’est aussi la raison pour laquelle je suis extrêmement attentif lorsque l’action des forces de l’ordre est mise en cause et lorsque l’on parle de violences policières.
Je sais aussi que nombre d’habitants de Calais et du Calaisis, avec leur tradition d’hospitalité, sont meurtris lorsqu’ils entendent qu’ils pourraient tolérer des violences de quelque nature que ce soit dans leur région. D’abord, il existe des voies de recours qui sont ouvertes par la loi à tout requérant, la saisine directe de l’inspection générale de la police nationale ou celle de la justice, via le procureur de la République territorialement compétent. Que ceux qui assistent à des scènes telles qu’ils les commentent les dénoncent et déclenchent de telles procédures. Ou alors, de fait, ils se rendent coupables de n’être que des commentateurs du verbe, il faut agir.
Ensuite, j’ai demandé au ministre de l’Intérieur d’examiner systématiquement et de rétablir la vérité des faits, soit pour défendre les agents lorsque ceux-ci justement n’ont pas commis de tels faits, y compris devant les juridictions, soit pour prendre toutes les mesures et sanctions qui s’imposent. Je ne tolérerai jamais que l’on travestisse la vérité. Face à ces dénonciations faites sans éléments de preuves et non portées à la connaissance de la justice, deux possibilités s'offrent à nous après les avoir examinées avec toute la rigueur nécessaire.
Soit les faits dénoncés ne sont pas avérés et relèvent de la diffamation, la réponse de l’État sera claire : répondre et, lorsque les conditions juridiques sont réunies, saisir la justice en cas de diffamation ou d’injure, et apporter tout le soutien juridique aux préfets et aux forces de l’ordre. Je sais aussi que certains policiers, mis en cause personnellement, ont eux-mêmes engagé des procédures.
Soit les faits ont une apparence de vérité, semblent probables, et j’ai également là demandé au Ministre de l’Intérieur qu’ils soient portés à la connaissance des autorités administratives et judiciaires, afin de mener les enquêtes nécessaires à la manifestation de la vérité. Et si les faits sont avérés, il y aura des sanctions administratives et la justice passera.
En la matière, il n’y a pas demi-vérité. L’ensemble de ces dispositions seront consignées dans une circulaire adressée par le Ministre de l’Intérieur aux préfets. Les forces de l’ordre doivent assurer l’effectivité de l’application de la loi. Si les migrants n'acceptent pas les propositions de mise à l'abri qui leurs sont faites systématiquement par les services de l’Etat, s'ils refusent les prises d'empreinte nécessaires dans le cadre du règlement Dublin, s'ils commettent des infractions, notamment en détériorant les camions ou des propriétés privées, ils le font en toute connaissance de cause, en toute responsabilité.
Aussi, nous leur devons ce message de vérité : rester à Calais, se fabriquer des abris de fortune dans les sous-bois et les marais, parfois dans des squats, constituent une impasse. L'alternative est claire et ouverte : elle passe par l'accueil dans des centres d'hébergement où la situation de chacun sera examinée avec la plus grande attention, notamment pour ceux qui demanderaient l'asile dans notre pays.
L’ordre républicain vaut pour tout le monde et je ne saurais expliquer à nos concitoyens qui chaque jour se lèvent, vont au travail, qui payent leurs impôts, qui se comportent en bon citoyen, qu’il y aurait une forme de non-droit pour certains autres. Il y a un devoir d’humanité, mais il y a aussi le devoir de respecter la loi de la République.
« Il y a un devoir d’humanité. Mais il y a aussi le devoir de respecter la loi de la République. » #Calais pic.twitter.com/YnciqzSgz1
— En Marche (@enmarchefr) 16 janvier 2018
Enfin, j’ai demandé au ministre de l’Intérieur, au regard des conditions particulières d’exercice de leurs missions, d’accorder cette année aux policiers et gendarmes affectés à titre permanent dans le Calaisis une prime exceptionnelle de résultat. Vos missions et votre exemplarité sont indispensables à la bonne mise en œuvre de cette nouvelle politique, celle dont nous avons besoin. Vous l’avez donc compris, mesdames et messieurs, c’est la plus grande rigueur, la plus grande exemplarité et le soutien complet de la nation qui vous est ici apporté.
L’accueil à Calais et dans le Calaisis est organisé et il est organisé selon des règles avec humanité, avec clarté, mais là aussi dans un ordre que nous avons défini et entendons faire respecter. Les premiers résultats de l’action conduite depuis plus d’un an sont tangibles. Depuis le démantèlement de la jungle, 8 200 personnes ont vu leur situation examinée dans les centres d’accueil et d’orientation et certains ont rejoint des centres d’accueil pour demandeurs d’asile. Ce fut en fin d’année 2016 une opération d’une ampleur exceptionnelle au niveau national.
Et l’Etat a mis en place dans le Pas-de-Calais, et notamment pour toutes les personnes qui justement sont arrivées depuis la jungle de Calais, un dispositif unique, expérimental, mais qui organise l’accueil que nous voulons ici, assurer. Il n’y aura aucune reconstitution de jungle et aucune tolérance sur une occupation illégale du domaine public ou privé à Calais ou dans ses environs.
Il y a par contre des centres d’accueil et d’examen des situations administratives qui ont été mis en place depuis le mois d’août dernier. Suite au discours que j’ai tenu à Orléans, le 27 juillet, trois centres ont été ouverts dans le Pas-de-Calais et deux dans le Nord. J’ai visité ce matin, avec plusieurs d’entre vous, le CAES de Croisilles, il s’inscrit pleinement dans ce dispositif. Et il répond aux engagements que j’ai pris. L’hébergement y est assuré, de manière inconditionnelle.
Un délai est octroyé à chacune et chacun à partir du moment où il arrive dans le centre d’accueil, d’une dizaine de jours, que dans la période hivernale, nous allons porter à une quinzaine de jours, suite à quoi, les personnels ici présents, avec justement la préfecture, l’OFII, les associations qui contribuent à ce travail, assurent l’accompagnement administratif pour que la procédure puisse se déclencher au plus vite. Nous avons divisé par quatre les délais d’instruction depuis la mise en œuvre de ce dispositif. C’est donc efficace et pertinent.
Le CAES leur permet ainsi de voir leur situation administrative examinée pour le plus rapidement possible avoir un rendez-vous devant le guichet unique de demande d’asile à la préfecture de Lille. Un mois au lieu de quatre mois avant ce dispositif, la qualité de la prise en charge repose sur un engagement que j’ai pu mesurer ce matin, et je veux remercier tous les acteurs de ce dispositif, la préfecture, la ville avec un maire exemplaire, qui s’est engagé, qui a dû convaincre, et aujourd’hui, une population qui s’est engagée.
C’est la solidarité justement que ce maire de Croisilles, que nous avons vu tout à l’heure, nous dit devoir à Calais, c’est cela le territoire de la République. Et donc c’est l’engagement de ce maire, des bénévoles dans sa commune, des associations qui œuvrent chaque jour à ce travail. Je veux rendre hommage collectivement et individuellement à toutes celles et ceux qui rendent concrète, effective cette action et permettent d’organiser cet accueil inconditionnel, des cours de français dès les premiers temps, du temps de présence, de l’accueil humain, et qui nous permettent d’assurer les procédures administratives beaucoup plus rapidement que naguère.
La qualité de la prise en charge passe par cette coopération avec les collectivités territoriales, de manière structurée. Et je veux ici tout particulièrement dire combien ce dispositif est important lorsque nous parlons des mineurs isolés. En effet, un dispositif d'accueil spécifique a été mis en œuvre pour offrir à tous ceux qui le souhaitent un hébergement digne et un accompagnement social adapté. Sur l’ensemble de l’année 2017, un peu plus de 2.200 personnes étrangères se déclarant mineures ont été prises en charge, à partir de Calais, au centre de protection de l’enfance situé à Saint-Omer, à une trentaine de kilomètres d'ici, dans un département qui reçoit chaque année 6.000 mineurs.
Le nombre de mineurs concernés en atteste : il est près de deux fois plus élevé en 2017 qu'au cours de l’année 2016, alors que la population concernée est nettement moins importante, comme je le rappelais tout à l’heure. Il y a donc aujourd’hui une préoccupation toute particulière pour ce département au sujet des mineurs non accompagnés.
Je veux ici remercier chaleureusement le président du Conseil départemental du Pas-de-Calais, Monsieur Jean-Claude LEROY, et les agents du service de l'aide sociale à l'enfance, pour votre engagement fort au service de cette politique de protection des mineurs étrangers non accompagnés. L’Etat prendra des dispositions particulières sur ce sujet, une réflexion d’ensemble, comme vous le savez, est conduite, mais pour le Pas-de-Calais tout particulièrement, il nous faut mettre en œuvre des réponses spécifiques, ce qui sera fait dans les prochaines semaines, et je souhaite que nous puissions aussi avoir de la part de nos amis Britanniques des réponses spécifiques sur ce sujet.
Je sais que la tâche est rude. Mais je sais également que le partenariat noué avec la préfecture, les services de l'OFII, les magistrats du tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer porte ses fruits dans ce contexte. La Garde des sceaux, qui est à quelques kilomètres d’ici en ce moment même, s’est rendue jeudi dernier à Boulogne-sur-Mer, au tribunal de grande instance pour justement examiner la mise en œuvre de ce dispositif.
Je veux aussi, à cet instant, rappeler qu’au niveau national, nous faisons face à l’arrivée croissante, sur l’ensemble du territoire, de mineurs isolés étrangers, près de 25.000 en 2017, principalement en provenance d’Afrique, et donc au-delà de ce défi du Calaisis, nous avons évidemment une réponse structurée que nous apporterons.
Vous le voyez, c’est un dispositif complet, d’accueil et de prise en charge qui est mis en place, qui est organisé, et non plus subi, et sur lequel nous tiendrons. La qualité de la prise en charge des personnes qui se trouvent dans la rue repose sur des maraudes organisées par l’Etat, par l’intermédiaire des associations, qui permettent d’aller au contact direct de ces populations. Parce que je sais, là aussi, l’inquiétude, et comme vous, j’ai vu les scènes, et je sais que beaucoup les voient au quotidien, les associations que je verrai tout à l’heure, les services de la ville aussi, qui nous font assister à ces scènes où de nombreuses femmes, de nombreux hommes restent encore cachés dans les sous-bois, dans des squats, dans la rue.
Sur ce sujet, nous allons au contact, l’organisation des maraudes est le moyen de les ramener vers ces centres d’accueil que j’évoquais à l’instant. Et nous devons continuer à développer ce qui est cette approche humanitaire et d’explication. J’appelle ici toutes les associations à la responsabilité, lorsque des associations encouragent ces femmes et ces hommes à rester là, à s’installer dans l’illégalité, voire à passer clandestinement de l’autre côté de la frontière, elles prennent une responsabilité immense.
Jamais, jamais, elles n’auront l’Etat à leurs côtés. Toujours, nous défendrons les associations qui, travaillant en partenariat avec l’Etat et les collectivités territoriales, vont au contact, apportent les services élémentaires, protègent, expliquent et permettent d’accompagner dans ces centres d’accueil. C’est ainsi que l’Etat organise les maraudes avec des associations, un financement complémentaire de l’Etat a été attribué à France, Terre d’Asile, qui est l’opérateur du département pour cette mission. Désormais, c’est une équipe de 7 travailleurs sociaux qui interviennent au contact, en permanence, de ces populations.
Et je veux ici leur rendre hommage. A chaque fois qu’une personne est identifiée, une proposition systématique de mise à l'abri lui est faite. A chaque fois qu’on lui dit qu’elle sera emmenée à la police, on lui ment, à chaque fois qu’on lui dit que lorsqu’elle est emmenée dans un centre d’accueil, si la police qui l’attend, on lui ment. Et c’est ce mensonge diffusé par de trop nombreux commentateurs, qui, aujourd’hui, nuit à notre efficacité collective, qui aujourd’hui nuit même à l’humanité que nous devons à ces personnes.
Je veux remercier ici les équipes de maraudeurs pour leur mission difficile, ô combien difficile, et ce contact direct qu’elles ont au quotidien avec ces populations. Notre honneur, c’est de protéger les plus vulnérables. Mais notre honneur n’est pas simplement d’avoir des déclarations faciles, faites depuis Paris, loin d’ici, en regardant telle ou telle photographie, notre honneur, c’est sur le terrain, d’aider celles et ceux qui apportent, non pas une situation d’expédients, non pas en quelque sorte l’installation dans une situation intenable, la promotion de l’illégalité, l’impasse, non, celles et ceux qui apportent l’humanité durable dans la République !
Alors, oui, la qualité de la prise en charge est assurée avec des financements complémentaires dégagés par l’Etat, et c’est normal, Madame la Maire, que l’Etat soit là sur ce sujet, parce que la ville a déjà beaucoup assumé. Des douches, des sanitaires, des points d’eau, un accès aux soins, de manière organisée et régulée. L’Etat le fait, grâce à l’ensemble des acteurs ici présents, en lien avec ces associations, des travailleurs sociaux, qui le font dans un cadre organisé. L’Etat le finance.
L’Etat le finance, 30 personnes sont accueillies chaque jour, en moyenne, à la permanence d’accès aux soins, de santé, du centre hospitalier de Calais, 30 par jour, c’est l’Etat qui le finance, qui l’assure, qui le fait. Et que les agents hospitaliers, qui accueillent ces personnes et les soignent, soient ici remerciés, que l’ensemble des acteurs de santé, qui font les premiers soins dans les centres que j’évoquais, soient ici remerciés. Que les associations, les bénévoles, qui s’engagent à nos côtés, soient ici remerciés.
Et je veux vous le dire ce matin très clairement, nous apportons tous ces services, mais il y en a un, aujourd'hui, que nous n’apportons pas encore, c’est l’accès à la nourriture, aux repas, qui est assuré aujourd'hui par des associations. Alors, je vais vous le dire très clairement, nous allons le prendre à notre charge, mais nous allons le prendre à notre charge de la même manière, de manière organisée, avec des points mobiles, sans tolérer aucune installation de campements illicites et en incitant tous ceux qui sont prêts à financer cette prestation, à contribuer à son financement dans le cadre organisé par l’Etat et avec l’Etat. C’est ce socle humanitaire que nous devons à chacun et chacun, mais dans l’ordre républicain, dans l’ordre assuré chaque jour, et en ne tolérant aucune reconstitution de campements illicites à Calais et dans le Calaisis. Ce travail est réalisé dans des conditions difficiles, là aussi inconnues ailleurs, et je veux ici apporter à l’ensemble des acteurs, que j’ai cités, la reconnaissance de la Nation.
« Aujourd'hui, l'État n'apporte pas l'accès à la nourriture à #Calais.
— En Marche (@enmarchefr) 16 janvier 2018
Nous allons désormais le prendre à notre charge, de manière organisée. » pic.twitter.com/JHbRp9Yuwo
Mais au-delà de Calais, ce qui est en jeu aujourd'hui, c’est l’ensemble de notre politique d’asile et d’immigration, et sur ce sujet les recettes trop faciles, les déclarations à l’emporte-pièce, n’apportent souvent pas grande solution. La nouvelle politique que nous voulons conduire est le fruit de valeurs qui sont les nôtres, d’humanisme, c’est un accueil inconditionnel dans l’hébergement des femmes et des hommes, en les protégeant, et du respect de l’asile que nous devons à chacun. Mais c’est aussi l’esprit de responsabilité que nous devons à tous nos concitoyens, quand on regarde l’état du monde, les dérèglements de nombreuses zones de voisinage, et la nécessité d’organiser dans la République cet accueil.
Notre ligne est claire, à chacun nous devons garantir un accueil digne et humain, en particulier la mise à l’abri lorsque c’est nécessaire. A tous nous voulons donner une réponse rapide. A ceux qui sont admis au séjour nous devons donner une vraie chance de s’intégrer. Mais à ceux qui ne sont pas admis, après l’exercice des voies de recours qui leur sont ouvertes, nous devons faire en sorte qu’ils regagnent effectivement leur pays.
Depuis tant d’années nous faisons tout à l’envers, nous accueillons de manière indifférenciée, nous prenons des délais inacceptables, et bien plus longs que tous nos voisins européens, 18 mois en moyenne pour obtenir l’asile, dans certaines régions c’est plus de 2 ans, nous n’investissons pas assez pour intégrer pleinement celles et ceux qui obtiennent des titres de séjour, l’asile ou des titres durables, et nous ne reconduisons pas celles et ceux qui s’installent dans des situations irrégulières.
La politique mise en place depuis l’été dernier c’est de remettre tout cela dans le bon ordre. D’abord par une politique internationale responsable, une politique de coopération, d’échange, avec les Etats d’origine et de transit. Celle mise en place dès le 28 août dernier à Paris, avec l’Union africaine, plusieurs Etats africains d’origine de transit, l’Union européenne, et plusieurs pays européens, pour permettre d’envoyer des missions de l’OFPRA qui assureront la protection, l’octroi de l’asile à des femmes et des hommes qui depuis le Niger et le Tchad y ont droit, leur évitant de passer des années, parfois, dans des camps en Libye, ou de traverser, à leurs risques, la Méditerranée, mais de permettre aussi le retour vers les pays d’origine de femmes et d’hommes qui n’ont aucune chance d’accéder à une protection, quelle qu’elle soit, en Europe. Ce travail est organisé avec et par l’Union européenne, en partenariat avec l’Office des migrations internationales et l’Union africaine. Il a commencé à donner ses premiers résultats, ce sera un travail long, patient, mais il suppose une coopération étroite avec l’ensemble des Etats du golfe de Guinée, de la bande sahélo-saharienne, jusqu’à la Libye.
Il est évident que les actions que nous menons par ailleurs pour stabiliser politiquement la Libye seront une des réponses durables pour mettre fin à ce qui est aujourd’hui un trafic organisé de femmes et d’hommes, dont le résultat final est vécu ici, mais qui se joue à l’international. L’action de la France est, sur ce sujet, cohérente, déterminée, vigoureuse.
C’est ensuite une politique européenne conséquente qu’il nous faut mettre en place, parce que dans nombre de cas nous vivons ici les incohérences, les insuffisances, de la politique européenne. Lorsque, je le vivais tout à l’heure avec certains d’entre vous, au centre on nous dit qu’on a tel ou telle femme ou homme qui se trouve en situation d’être contrôlé et qui avait demandé quelques mois plus tôt l’asile, en Italie ou en Allemagne, et qu’il faut reconduire dans ce pays pour qu’il puisse reprendre les délais, et puis qu’il revient quelques semaines plus tard. Le système de Dublin tel qu’il a été mis en place est plein d’incohérences, en tout cas n’est pas aujourd'hui satisfaisant.
Alors, j’entends les critiques de ceux qui veulent mettre fin au système de Dublin et de l’Etat responsable pour la demande d’asile, pour le remplacer par un système où la demande d’asile pourrait être déposée dans n’importe quel Etat européen. A court terme ce n’est pas une solution envisageable parce qu’elle conduirait à déresponsabiliser tous les pays d’entrée. Ce que nous devons faire c’est organiser une politique européenne plus solidaire à l’extérieur et en son sein, et donc mettre plus de moyens aux contrôles des frontières, plus de cohérence dans la politique à l’extérieur de nos frontières, tel que je viens de l’évoquer, et faire converger nos systèmes d’octroi de l’asile, nos règles, et assurer le déploiement d’un système unique et intégré de contrôle. C’est en cours, mais cela va trop lentement.
Les Etats doivent continuer à être responsabilisés, mais il nous faut, aujourd’hui, assurer une gestion plus harmonieuse, au sein de l’Union européenne, qui nous permettra, dans le cadre de cette avancée, d’aller vers un Office européen de l’asile, qui est l’objectif que nous poursuivons. C’est pourquoi je souhaite que nous accélérions les travaux de déploiement d’un système unique pleinement sécurisé de contrôle des identités et de partages complets des informations entre Etats européens de l’espace Schengen. C’est pourquoi nous devons nous donner tous les moyens pour assurer une plus grande convergence de nos législations, c’est tout l’enjeu de la négociation européenne en cours, dont je souhaite une conclusion rapide. Et nous en tirerons toutes les conclusions au niveau national.
La refonte de notre politique d’asile et d’immigration, à travers le projet de loi porté par le ministre d’Etat, vise justement à la plus grande convergence avec nos principaux partenaires européens, notamment avec l’Allemagne. Nous devons accélérer nos délais pour instruire la demande d’asile. J’ai parlé du délai de 18 mois en moyenne, nous devons le ramener à 6 mois, parce que c’est la protection que nous devons à quelqu’un qui demande l’asile en France, et parce que, si nous voulons pouvoir reconduire quelqu’un qui n’obtient pas l’asile, au final, si nous mettons des procédures qui durent 2 ans, il s’est installé dans une vie normale, et nous n’appliquons pas les conséquences d’une telle mesure.
Nos voisins savent conduire ces procédures en 6 mois. C’est donc vers cela que nous irons, en raccourcissant les procédures et, dès le début de la phase, en commençant l’instruction des dossiers. C’est mieux protéger ceux qui ont droit à l’asile, et c’est éviter de créer des situations inextricables, mais c’est aussi rendre plus efficaces nos politiques de reconduite à la frontière.
« Nous devons accélérer nos délais pour instruire la demande d'asile : nous devons le ramener à 6 mois.
— En Marche (@enmarchefr) 16 janvier 2018
C'est mieux protéger ceux qui ont droit à l'asile et c'est éviter des situations inextricables. » #Calais pic.twitter.com/QOmXJL8uqa
J’entends les commentaires sur ce sujet dans un projet où il est question de porter la durée maximale de la rétention administrative de 45 à 90 jours. Regardons des pays, que j’ai souvent défendus, l’Allemagne, la chancelière allemande a eu une politique courageuse sur les réfugiés. Quel est le droit en Allemagne ? La durée moyenne est de 180 jours, jusqu’à 18 mois dans certaines situations, mais enfin, que les gens qui nous disent que ce serait la fin de tout, regardent comment ça se passe à nos frontières, dans l’Union européenne, dans des pays que nous prenons comme exemples. Ce qui ne va pas c’est justement quand mes divergences sont profondes entre des pays voisins, qui partagent des frontières, quand nos délais de rétention, nos délais d’instruction sont totalement décorrélés les uns des autres, parce qui l’utilise ? Les filières de passeurs, ceux qui exploitent la misère, et qui guident d’un côté ou de l’autre, en contrepartie d’argent.
C’est un effort historique, qui est accompli par l’Etat en la matière, et que nous mènerons à son terme, parce que l’objectif, oui, il est bien d’accueillir tout le monde de manière inconditionnelle, de vérifier tout de suite, de pouvoir instruire rapidement, de protéger les uns, de raccompagner les autres. En la matière l’hébergement d’urgence est évidemment une question éminemment sensible.
J’ai pris des engagements et nous irons au bout et nous les tiendrons. Et en matière d’hébergement d’urgence, nous avons depuis le mois de juillet dernier poursuivi une ambition qui était inconnue jusqu’alors. 143 000 places financées par l’Etat sont ouvertes pour accueillir chaque nuit les personnes en détresse contre 126 000 l’année dernière à la même époque.
Nous avons consacré cette année plus de deux milliards d’euros pour l’hébergement d’urgence des personnes vulnérables. Pour les demandeurs d’asile, nous ouvrirons 4 000 places supplémentaires en 2018 et encore 3 500 en 2019, pour atteindre à cette date un délai total de 88 000 places, c’est deux fois plus qu’en 2012. Pour les réfugiés, nous mobiliserons 20 000 logements d’ici la fin 2018, avec la mise en place d’un dispositif spécifique d’accès hors DALO et 5 000 nouvelles places de centres provisoires d’hébergement pour les réfugiés les plus fragiles en 2018-2019.
Mais enfin, ces chiffres ont un sens. Il y a une réalité derrière. Il y a un engagement budgétaire. C’est l’engagement de toute la nation et, là aussi, je ne peux accepter celles et ceux qui profèrent des contre-vérités et ne reconnaissent pas cet engagement inédit. Simplement cet engagement, il va avec un contrôle. C’est le contrôle que nous devons aux concitoyens français. C’est le contrôle qui va là aussi avec l’ordre républicain et c’est le contrôle qui va avec l’esprit de responsabilité qui fait que lorsqu’on installe dans un logement puis progressivement dans un vie normale un réfugié, on ne va pas l’installer dans les quartiers les plus difficiles de la République qu’on a déjà depuis bien longtemps abandonnés. Parce qu’on fait la République au concret, on ne la fait pas en deux lignes un matin de mauvaise conscience.
« + 23.000 places d'hébergements d'urgence ouvertes cette année.
— En Marche (@enmarchefr) 16 janvier 2018
+ de 2 milliards d'euros investis.
Je ne peux accepter ceux qui profèrent des contre-vérités sans reconnaître l'engagement inédit pris en faveur des réfugiés. » #Calais pic.twitter.com/03xQRQrXpS
Aussi si l’accueil inconditionnel des personnes vulnérables est « l’honneur de la République », l’accueil inconditionnel ne veut pas dire l’accueil indifférencié. Je ne sais pas expliquer aux Français que nous consacrons des moyens budgétaires croissants sans connaître la situation de chacun au regard de la loi. J’ai aussi au-delà de ce sujet d’hébergement une ambition forte pour l’intégration dont je souhaite revoir en profondeur la politique conduite jusqu’à présent avec un contrat d’intégration républicaine qui sera complètement revue.
C'est pourquoi le Premier ministre et le ministre d’Etat ont demandé au député TACHE de faire des propositions ambitieuses en matière d’intégration des personnes ayant obtenu un droit de séjour en France. Ses conclusions pourront alimenter le projet de loi sur l’asile et l’immigration. Nous devons faire plus le plus tôt possible pour enseigner le français, permettre une intégration plus rapide comme nous l’avons parfaitement vu ce matin du fait de bénévoles et d’un engagement local, associatif, citoyen.
Nous devons non seulement le valoriser mais l’encourager, investir plus que nous ne faisons aujourd'hui. Le volume de cours de langue française doit être porté à son maximum, à ce qui est utile et crédible pour qu’une femme ou un homme qui vient de l’autre bout du monde et à qui nous apportons la protection que nous lui devons puissent entrer dans la communauté nationale.
Je veux aussi que cet engagement soit un engagement en matière de formation professionnelle, d’accès à l’emploi, avec une logique de contractualisation avec les partenaires sociaux pour offrir une formation qui soit adaptée aux filières en tension dans les régions concernées. Je veux sur ce sujet une impulsion très forte, spécifique, portée sur l’intégration des réfugiés.
L’Etat mettra en place un accompagnement personnalisé renforcé concernant les réfugiés les plus vulnérables. Je pense en particulier aux femmes réfugiées. Dès la semaine prochaine, un délégué interministériel à l’accueil et l’intégration des réfugiés sera nommé en Conseil des ministres.
Vous le voyez, cette politique est exigeante, complète, mais elle implique à chaque étape un discours de vérité, une exigence qui est celle de la République. L’Etat s’engage, l’Etat n’est pas dans la démagogie, dans la facilité ou dans l’irresponsabilité et avec lui, l’ensemble des collectivités territoriales de la République. Et je veux saluer ici l’engagement de la région, du département, de la ville et des nombreuses villes que j’évoquais depuis tout à l'heure qui sont ici partenaires.
C’est cet esprit républicain qui nous fera tenir et avancer. Parce que c’est ce que nos concitoyens attendent de nous. Ils attendent l’ordre, l’autorité là où elle doit être exercée, l’humanité à chaque instant et ils n’attendent pas des déclarations. Ils attendent des manches retroussées pour agir sur le terrain dans ce cadre, avec celles et ceux qui portent la République et l’ambition de la République au quotidien.
Mais l’Etat, et je conclurai sur ce point, sera aussi présent pour l’avenir du territoire. C’est ce que nous devons au Calais d’aujourd'hui et de demain. Un territoire qui dispose de formidables atouts, sur lequel nous devons capitaliser ensemble. Je les évoquais tout à l'heure en parlant des atouts de la région, de sa situation géographique, de sa place dans les échanges européens, de sa place en matière de logistique, en matière économique, industrielle, de services, en matière de pêche.
Sur ce sujet, je sais les intérêts de la région dans le contexte tout particulier du Brexit. Je sais, monsieur le Président de la région, madame la Maire, combien vous êtes sur ce sujet soucieux.
Je sais aussi combien sont soucieux de nombreux milieux économiques de la pêche, de l’industrie, de la logistique, qui s’interrogent sur les conséquences possibles du Brexit. Les intérêts de la région seront pleinement pris en considération dans le cadre des discussions et des négociations que la France mènera. Je vous les rendrais transparentes dans le cadre du mandat que nous préparons pour le mois de mars à l’endroit de notre négociateur, Michel BARNIER.
Il est évidement nécessaire que l’ensemble de ces filières soit pleinement pris en compte. Quelles que soient les évolutions à venir et les relations entre l’Union européenne et le Royaume Uni, le territoire demeurera attractif sur ce plan et doit le demeurer.
La région est également attractive pour les investisseurs internationaux et vous pouvez compter sur l’Etat pour vous accompagner dans cette démarche. La région s’est beaucoup mobilisée, l’Etat sera toujours à ses côtés, nous continuerons à l’être dans les prochains jours et les prochaines semaines.
L’Etat apporte aussi à Calais un soutien important, notamment dans le cadre du contrat de développement du Calais où tous les engagements pris ont été, et seront tenus, en particulier dans la deuxième phase de mise en œuvre.
J’ai notamment demandé une mobilisation de toutes les administrations concernées pour débloquer certains dossiers majeurs pour le territoire. Je pense au soutien aux entreprises ou à certains projets d’aménagement.
Je souhaite que nous poursuivions ce soutien au regard de vos nouvelles priorités et je suis favorable à ce que soit examiné et à ce qu’une réponse positive soit apportée à deux opérations qui pourraient être réalisées à court et moyen terme, via un avenant au contrat de développement du Calais, la réalisation de la seconde phase de l’opération d’aménagement du front de mer de la ville de Calais et l’opération culturelle, le Dragon, qui je le sais, Madame la Maire, vous est chère.
Voilà Mesdames, Messieurs, ce que, aujourd'hui j’étais ici venu vous dire. Vous le comprenez si j’ai souhaité m’exprimer devant vous, c’est pour vous dire à tous, combien vous méritez la reconnaissance des Français pour votre action. A travers toutes ces épreuves, Calais est aujourd'hui un défi pour la République, mais Calais est une image de la République.
Agents de l’Etat et des collectivités territoriales, soyez fiers de votre engagement, policiers, CRS, militaires de la gendarmerie, militaires, douaniers, soyez fiers de votre action, comme la République peut être fière d’avoir en son sein des agents engagés pour faire gagner l’intérêt général. Associations, bénévoles, citoyens engagés, soyez remerciés pour cette détermination de chaque jour.
Mesdames et Messieurs les élus, je veux également ici vous dire la reconnaissance qui est la mienne pour vos actions et le travail qui est conduit ici avec l’Etat.
Vive Calais, Vive la République et Vive la France.