Rencontre avec Hervé, fondateur du groupe "Solidarité Coronavirus Brest"
1 avril 2020 - Né le 17 mars sur Facebook, ce groupe d’entraide connaît à Brest un succès grandissant. “Ceux qui ne peuvent plus travailler ont envie d’aider et proposent spontanément leurs services” confie Hervé, le fondateur. Il nous en explique le fonctionnement.
Dans quelle optique avez-vous créé le groupe “Solidarité Coronavirus Brest” ?
Le premier jour du confinement, j’ai remarqué plusieurs initiatives isolées sur Facebook : un copain qui allait faire ses courses proposait de les faire en même temps pour les soignants de son quartier, une lycéenne voulait mettre en place une aide aux devoirs pour les enfants dont les parents travaillaient … C’est comme ça que j’ai eu l’idée d’ un endroit où regrouper toutes ces initiatives. J’ai donc créé un groupe Facebook, en commençant par inviter des gens de mon réseau personnel et professionnel dans la ville. Le bouche-à-oreille numérique a très vite fonctionné : dès le mardi soir, nous étions plus de 300 membres et les premiers services se mettaient en place. J’ai été très ému lorsque j’ai reçu un premier message de remerciement, celui d’une jeune femme célibataire avec un nourrisson de quelques mois qui ne pouvait pas se déplacer et qui, grâce au groupe, a trouvé quelqu’un pour lui rapporter un colis du Secours Populaire. C’est exactement pour ce genre de services, simples, évidemment gratuits, et qui signifient beaucoup en période de confinement, que j’ai initié ce groupe.
Aujourd’hui, il y a plus de 4000 membres dans le groupe : les règles du jeu ont-elles changé ?
J’assure un travail de modérateur pour que le groupe demeure un espace de confiance, imperméable aux fake news, où échanger des services. Le but n’est pas d’être une page d’informations, mais bien une plateforme d’entraide !
Pour faciliter la mise en relation des aidants et des aidés, j’ai suggéré la mise en place de hashtags, qui permettent d’indiquer son quartier et le type de services proposés ou attendus. Par exemple : #courses, #devoirs, #animaux etc. Au fil des jours, le groupe a vu l’émergence d’autres formes de services. Il y a des offres de logement pour les soignants, que je compile et transmets chaque jour au CHU. Il y a aussi des propositions pour du matériel médical réalisé à la maison : des masques en tissu, des visières produites sur des imprimantes 3D ... Enfin, il y a aussi de plus en plus de petits mots d’artisans, maraîchers, épiciers et commerçants qui s’adaptent au confinement et organisent des systèmes de drive, voire parfois des dons, pour que leurs produits restent accessibles.
En tant qu’administrateur du groupe, je dois quotidiennement approuver les demandes d’adhésion et valider les publications, mais l’objectif est que les échanges s’effectuent directement entre les membres, de manière indépendante. En revanche, j’appelle au respect des gestes barrières en toutes circonstances entre les aidants et les aidés et je rappelle régulièrement les règles du confinement. C’est pourquoi l’entraide s’organise en hyper-proximité, à l’échelle du quartier. Lorsque je reçois des demandes d’habitants de Plabennec, de Lesneven, de Plougastel ou de Kerhuon, je les encourage plutôt à créer des groupes sur le même modèle, à l’échelle de leur commune !
Pensez-vous continuer d’animer le groupe à la fin de la période de confinement ?
C’est la grande question. Ce qui est sûr, c’est que j’aimerais que ce qu’on a construit tous ensemble serve à quelque chose pour la suite. Par exemple, on s’est rendu compte qu’il y a beaucoup de gens prêts à aider mais que tout le monde n’ose pas demander de l’aide ou, s’ils souhaitent le faire, tous n’ont pas forcément accès à des groupes d’entraide numériques. Pour toucher ces gens-là, le contact humain est encore irremplaçable et, après le confinement, il faudra peut-être prendre le temps de mettre un petit mot dans le hall de son immeuble ou d’aller frapper aux portes de ses voisins pour demander : “est-ce que ça va ?”, “avez-vous besoin de quelque chose ?”. C’est tout simple, mais si on modifie un peu nos comportements pour mieux prendre soin les uns des autres à l’avenir, on aura retiré quelque chose de positif de toute cette histoire.